
Le Burkina Faso est la cible d’attaques terroristes depuis sept (07) ans maintenant. Une situation qui a occasionné un mouvement massif des populations des zones attaquées vers d’autres localités réfutées paisibles. Ces personnes communément appelées déplacés internes bénéficient de l’assistance de l’état mais aussi d’autres organismes que sont les organisations non gouvernementales et ou les associations. Hope Isis une association à but non lucratif s’est donnée pour mission de venir en aide à ses personnes. La présidente de l’association Anaïs Drabo que nous avons rencontré nous raconte comment est née l’initiative, les actions déjà menées par l’association ainsi que les projets quelle entend mettre en œuvre. C’est ce 31 mai 2022 à Ouagadougou
eclairinfo.net : Hope Isis, depuis quand existe-il ?
Anaïs Drabo : Hope Isis dans l’informel existe depuis 2018. Quand je dis dans l’informel, on allait dans les orphelinats et puis on faisait des petits dons, mais Hope Isis réellement de façon formelle c’était en 2022 que nous avons eu nos papiers pour la reconnaissance. Hope Isis, Hope, c’est l’espoir en anglais, Isis c’est le nom de ma fille. Celle-là même que j’ai cherché pendant longtemps, pratiquement 10 ans à chercher un enfant d’où le nom Isis qui symbolise le dieu de l’immortalité, donc il fallait vraiment que je donne le nom Isis à l’association parce que ça donne de l’espoir pour toute personne qui est désespérée, surtout au Burkina ici…
eclairinfo.net Et Comment est née l’initiative ?
Moi je suis issue d’une famille très pauvre, je n’ai pas reçu de cadeau depuis mon enfance. Les gens me regardent, ils se disent elle a tout eu, mais moi je n’ai rien eu. D’abord, mes parents se sont divorcés quand j’avais cinq ans déjà, il faut que tu sois entre le père et la mère, c’est difficile, donc vu cette souffrance, il fallait que je fasse quelque chose. C’est en fait un rêve d’enfant de vouloir tout améliorer, parce que je me dis que je peux changer les choses et j’ai la volonté pour ça, rien ne peut m’arrêter parce que j’ai la foi, j’ai foi en un avenir meilleur pour ma nation, et toute personne devrait marquer sa génération de façon positive et c’est ce que moi je tente de faire.
eclairinfo.net : Pourquoi l’humanitaire comme domaine d’intervention ?
L’humanitaire parce que j’ai un cœur de bébé [sourires], ça je le sais, j’ai un cœur d’enfant, et chaque fois que je vais à quelque part je vois la misère, peut-être parce que j’ai vécu cette misère pendant longtemps que je comprends la vie du bas-peuple. Je suis née à Niongsin, tout le monde connaît Niongsin et il faut aller là-bas pour comprendre le réel du Burkina, il faut vraiment naître là-bas pour comprendre, il faut savoir d’où on est venue. Et je sais comment j’ai trimé pour être là déjà et je ne peux pas oublier, donc tout ce que je peux faire pour améliorer la situation des gens, j’y vais.
eclairinfo.net Quelles sont les actions menées par votre structure depuis sa création ?
Hope Isis depuis 2018 fait de petites actions dans les orphelinats avec les femmes [les vieilles dites sorcières]. Hope Isis est parti à Banfora faire des dons, Hope Isis est parti à Fada au village Yamba faire des dons de vivres, Hope Isis est parti à Kaya faire des dons, à Ouagadougou ici, Hope Isis a fait Pazani où en collaboration avec des partenaires, on a fait un forage pour les déplacés internes de Pazani. Voilà ce que Hope Isis fait.
eclairinfo.net : Quels sont vos projets en perspectives ?
Hope Isis veut aller partout, et c’est là où on dit qu’on ne peut pas aller que Hope Isis doit aller. S’il y a des zones où on dit qu’on ne doit pas aller, et les personnes qui vivent dans ces zones, vous voulez qu’ils fassent quoi si tout le monde doit fuir ces zones? Donc nous ne vivons que de dons des gens. Officiellement, Hope Isis n’a jamais eu de dons de l’État ou d’une personnalité de l’État, jamais. Hope Isis ne vit que des dons des gens. J’ai une liste de personnes à qui je dois donner à manger alors que je n’ai pas à manger pour ces personnes-là. Et donc quand j’ai un besoin en vivres, je vais taper à des portes, je fais des appels aux dons sur les réseaux sociaux. Anaïs fait ça, je n’ai pas le choix. Vivement que les Burkinabè se mettent en tête que c’est nous d’abord, avant que l’État ou avant que toute autre personne ailleurs ne vienne nous aider, si entre nous Burkinabè, on ne peut pas s’aider, comment quelqu’un d’autre peut nous aider, si entre nous Burkinabè, fils et filles d’un même pays, on ne s’aide pas, ce ne sont pas des étrangers qui vont venir nous aider. Donc vivement que les curs s’ouvrent et qu’on retrouve l’amour entre nous parce qu’on a perdu ça.
eclairinfo.net : Qu’est-ce que Anaïs a du fond du cœur à dire aux autorités actuelles notamment en ce qui concerne l’humanitaire ?
Je demande franchement à l’action humanitaire de sillonner les 45 provinces du Burkina. Je demande à l’action humanitaire de se rappeler que même à Ouagadougou ici, il y a des déplacés internes. L’ancien régime a voulu occulter le fait qu’à Ouagadougou il y a des déplacés, l’ancien régime disait aux gens de ne pas venir à Ouagadougou, parce qu’on ne voulait pas que les gens sachent qu’il y a des déplacés. Mais il faut qu’on se dise la vérité, parce que l’heure n’est plus à ça, il faut que ce ministère se bouge, qu’on sente l’action humanitaire tous les jours sur le terrain. C’est la faim qui tue les gens aujourd’hui. Le terrorisme va finir, mais c’est la faim qui tue les gens aujourd’hui, les gens ont faim. Il faut être sur le terrain pour comprendre à quel point les gens ont faim. Il faut être au bas-peuple pour savoir que les gens ont faim, mais au bureau on ne peut pas. Il faut que la transition lâche le bureau et que la transition soit sur le terrain.
eclairinfo.net : Quel est votre mot de fin ?
Vivement que la paix revienne, que les gens reconnaissent que cette guerre ne peut finir militairement seulement parce que ce ne sont pas des Burkinabè contre des étrangers, ce sont des Burkinabè contre des Burkinabè, le mal est plus profond. Il faut savoir d’où vient le problème, il faut dialoguer, il faut demander pardon à une frange de la population qui s’est sentie rejetée pendant si longtemps, il faut qu’on s’asseye, qu’on refonde notre Burkina Faso.
Pierre Bonkoungou